À travers les âges

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Dix-huit ans. Depuis quelque temps, le bloc-notes et le stylo ont remplacé les listes interminables de fourniture scolaire. Je viens d’avoir mon bac. Je veux profiter pleinement de cette pause avant de me plonger dans l’inconnu du monde universitaire. L’été de tous les possibles, de toutes les folies. Je ne pensais pas si bien dire, j’avais fait un grand plongeon, mais, dans ses bras.

Je le regarde partir, assise derrière la vitre du train. Dans quelques secondes, le paysage remplacera son visage. Nous nous promettons de nous aimer à l’infini malgré les kilomètres qui nous séparent. Ma mémoire se ravive : les danses autour du feu de bois, les chansons à la guitare, les rires à l'unisson, les mots d’amour jetés dans la nuit, le ciel étoilé au-dessus de nous, l’eau froide de la rivière qui me glace le sang, les feux d’artifice émerveillant nos yeux, ses bras autour de moi et nos initiales, pour toujours graver sur cet arbre.

Le mois de septembre a éteint tout ça. Il m’a pris mon amour, nos longues nuits d’été, nos promesses sous les étoiles, mais il a mis dans mon cœur, pour toujours, la passion de la jeunesse et le songe d’un été qui ne finit jamais.

 

Vingt-quatre ans. J’ai noirci des pages et des pages d’ambitions inavouées. Des piles de cours stabilotés. Mais, cette année, c’est la dernière année. Me voici en master à l’université, désabusée et désenchantée. De présentation en présentation de début d’année, j’ai l’impression d’être à un rassemblement pour les alcooliques anonymes qui n’en finit jamais.

Le décalage entre la théorie et la pratique me surprend de mois en mois, je me sens révoltée. Ma présentation en a laissé plus d’un coi, dont moi : « Je m’appelle Marie, c’est ma 5e année. L’année dernière, j’étais ici aussi, et ce que je souhaite et espère pour cette année, c’est qu’on arrête de se moquer de moi et qu’on m’apprenne quelque chose dont je pourrais me servir dans la vie réelle ».

Je m’assois. Qu’ai-je fait ? Tout le monde me regarde choquer. La professeure vit mal les propos qui m’ont échappé, mais je ne sais laquelle de nous deux est la plus effarée. Le mois de septembre avait à peine commencé que je l’avais massacré.

 

Maintenant. Je me suis parfois demandé pendant mes études, si j’aurai besoin de stylo et de bloc-notes dans ma vie d’adulte. Sans imaginer qu’effectivement ils me serviraient, mais pour déposer les bruits de mon cœur, partager mes expériences et écrire des histoires. Le temps a passé, je ne fais plus de présentations de début d’année. Je n’ai plus de rêves de wonder woman et de femme d’affaires.

Parfois, je passe devant les agendas scolaires avec nostalgie, en repensant aux longues listes de fourniture scolaire, à l’insouciance de ces jeunes années, aux rencontres d'été, aux enseignements notés et finalement à tout ce qui m’a fait grandir et évoluer.

Le mois de septembre a un goût de résolutions de jour de l’an : se lancer de nouveaux défis, prendre un autre rythme, développer de nouvelles compétences, se remettre au sport, etc.  Mais surtout, trouver sa place, suivre son cœur et se donner les moyens de voir se réaliser ses rêves, parce que oui, tout est possible, le mois de septembre arrive pour nous le chuchoter.

 

 

 

Commentaires

Quel beau texte ! 🔥👏💛

Magnifique !!! 

Reflète tellement le mois de septembre.

👏👏👏

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