Le royaume de septembre

C’est un doux matin de septembre que tout débuta.

 

Le ciel était calme et paisible, près à accueillir ces nouveaux êtres. Ceux-ci étaient attendus depuis des années, et, c’est au premier jour de septembre qu’ils arrivèrent. Les héritiers à la couronne.

 

12 nations se partageaient le monde, chacune représentait un mois, la nature étant comme figée dans le temps, bien que les dates passaient comme dans notre monde. Ainsi, dans le royaume d'Avril, les fleurs commençaient à bourgeonner tous les jours. Dans le royaume de Juillet, le soleil était au beau fixe et l’herbe s’asséchait. Dans le royaume d’Octobre, les feuilles tombaient tous les jours, rougissant. Finalement, dans le royaume de Septembre, la pluie fine et douce tombait aussi souvent que les fruits.

 

De tous les royaumes, Septembre était l’un des plus joyeux et prospère. Ils aimaient travailler dur, avec énormément d’assiduité afin de parvenir à conserver leur nation aussi belle et prospère. Ainsi, dans ce pays semblant si parfait, les problèmes de fertilité de la reine angoissaient tout le monde, du plus noble seigneur au simple paysan.

 

Les deux enfants, nés à l’Aube du premier septembre semblaient robustes. De plus, le fait qu’il n’y en ait non pas un mais deux comblait tout le royaume, car, ils pourraient sans le moindre soucis avoir un souverain et un chef des armées de sang royal, sans même avoir à forcer les choses. Après tout, ils seront éduqués de la même façon, l’un comme l’autre, afin de les préparer à tout et de les élever à leur rang.

 

Au cours des années, Jiu et Yuè apprirent des centaines de choses, qu’il s’agisse d’apprentissages théoriques sur la vie de souverain, de techniques de combats complexes ou d’exercices intellectuels. Tous deux se distinguèrent dans chaque domaine, étant bien plus compétents que nul n’aurait pu l’espérer. Pour cause, on ne savait pas s’il s’agissait de leurs gènes potentiellement extraordinaires ou leur rivalité sans faille, les poussant toujours à surpasser l’autre, qu’importent les efforts qu’ils devaient fournir.

 

La compétition était leur quotidien, essayant toujours de dépasser l’autre, quoi qu’il advienne. Toujours avec ce besoin d’être le meilleur.
Pourtant, dès l’âge de 12 ans, ils commencèrent à se démarquer. Chacun trouvant la discipline dans laquelle il était le meilleur.
Ainsi, dans les matières plus physiques et dites de guerre, comme l’équitation, le maniement de la lance, de l’épée, ou encore les méthodes de renforcement corporel et le tir à l’arc, Jiu était presque toujours meilleur. C’était totalement naturel pour lui. Avec sa carrure très imposante, à la fois grande et large, ses cheveux bruns assez longs ou encore ses yeux d’un gris acier, il jouait de la lance et de l’épée, à pied ou à cheval. Il n’avait aucun mal à laisser une forte impression, paraissant à la fois impressionnant mais digne de confiance.
Au contraire, dans les matières très théoriques et dites royales, comme la diplomatie, l’art de gouverner, ou encore apprendre et appliquer les lois, choisissant les peines, Yuè était presque toujours le meilleur. Chez lui, c’était plus que naturel. Malgré sa carrure assez imposante, il n’était pas vraiment effrayant, ses cheveux bruns toujours en ordre et ses yeux d’un noisette sincère et appelant à la confiance, il jouait de paroles, de gestes et de mimiques afin de faire rire et d’attiser la sympathie de tout un chacun. Tout cela en suivant bien entendu les moindres règles de tenues et d’éthiques.
Mais, ni l’un ni l’autre ne parvenait à se détacher sur le point de vue de l’intellect. Étant tout aussi rusés et réfléchis l’un que l’autre, quoi qu’ils fassent, c’était toujours après mure réflexion, afin de prendre les meilleures décisions en toutes situations.

 

Malgré leur emploi du temps chargé, ils ne manquaient jamais une occasion pour aller dans les campagnes du royaume afin de donner un coup de main. C’était à la fois un bon moyen de s’entraîner et de voir la réalité du terrain, après tout, qu’importe leur futur rôle, ils auraient besoin de ces informations et de ce contact facile et agréable avec les citoyens. Ces visites étaient aussi très motivées par les réactions des paysans à qui ils apportaient leur aide, tous avaient toujours été chaleureux et heureux de les voir.

 

Tout le monde s’accordait sur eux. Ils étaient de bons jeunes, robustes, agréables et ouverts. De plus, leur connexion était si forte qu’ils pouvaient accomplir toutes les tâches qui leurs étaient demandées.

 

Suffisamment différents l’un de l’autre pour se compléter.
Ils étaient pourtant assez similaires pour se comprendre.

 

C’était indéniable, et, personne n’osait remettre ceci en cause. Ni à ce moment, ni même plus tard.
Les années passèrent vite, les deux garçons devenaient de plus en plus proches et se renforçaient de plus en plus. A leurs 17 ans, leurs destins furent scellés.

 

« Aujourd’hui, au nom de notre royaume tout entier, je tenais à tous vous annoncer une grande nouvelle. »
Le roi, le père des jumeaux, un homme bon et juste, avait fait se réunir autant de monde que possible sur la place principale du château. Jiu et Yuè étaient là aussi, en tenue de cérémonie, drapés de bleu, un genou à terre, l’air digne, face à leur père. Nul ne savait réellement ce que le roi annoncerait, il n’avait parlé de quoi que se soit à personne.

 

« Ma décision est enfin prise. Mes deux fils, Jiu et Yuè que vous connaissez tous prendrons mes successions, l’un en tant que roi, l’autre en tant que chef des armées. »

Bien que tous se doutaient déjà des places qui seraient attribuées, nul ne pouvait décoller ses yeux du roi, attendant la grande annonce.

 

« Yuè me succédera en temps que roi de la Patrie de Septembre. Quand à Jiu, il me succédera en tant que chef des armées de la Patrie de Septembre. Mes fils, vous pouvez à présent vous relever. »

La foule scandait déjà, tous heureux de la nouvelle, pendant ce temps, les jumeaux suivirent l’ordre de leur père, faisant une simple révérence une fois debout. Puis, comme un même homme, ils se redressèrent.

 

« Merci pour cet honneur père ! »
Sous les acclamations de la foule, Jiu et Yuè prirent réellement conscience de ce poids qui leur pesait à présent. Ce n’était plus que leurs vies qu’ils défendaient et représentaient, c’était maintenant celles de tous les citoyens de Septembre, ce qui faisait un nombre incommensurable. Cette responsabilité nouvelle commença à leur peser, avant même de réellement prendre leurs fonctions.

 

Bien que tout le monde essaya de les rassurer du mieux qu’ils pouvaient, leur montrant qu’il n’y avait rien à craindre, que le royaume était de toute façon en paix, très heureux et abondant, ils le sentaient, ils avaient cette sorte de pressentiment que quelque chose clochait, que tout ne se passerait pas bien.
C’est ainsi que les années passèrent, les deux garçons restaient toujours sceptiques quand à leur futur, et, ce sentiment grandit avec eux.

Grandit tout autant que les tensions entre nations.

Grandit tout autant que vieillit leur père.
Grandit tout autant que la guerre qui frappa à leurs portes, le premier jour de Septembre. Date de leur 23ème anniversaire. Ils devaient déjà affronter une guerre, et ce, pas n’importe comment, en tant que Roi, que Chef des Armées et en tant que Stratèges. Ces fonctions accumulées pesaient lourds pour de si jeunes personnes, pourtant, ils ne rechignèrent pas à la tâche. Après tout, pourquoi le feraient-ils ? Ils étaient habitués à tout affronter ensemble. Tant qu’ils étaient ensemble, rien ne pouvait leur arriver.

 

Face à eux se dressait la nation de Janvier. Ils étaient réputés comme étant parmi les combattants les plus hardis et cruels, ne pardonnant ni n’épargnant personne. « Ils peuvent brûler le monde de leur simple volonté ! » raconte-t-on même. Ce royaume ne lâcherait rien, du moins, pas tant qu’ils ne vaincraient pas. Pour eux, l’honneur de la patrie avait été bafoué quand le roi de Septembre leur émit des idées, avec l’objectif de changer leur nation.

Cette simple allusion coûta cher à Septembre dès le lendemain, quand une des places principales pris feu. Une signature faites de cristaux de glace fut retrouvée. Il s’agissait de la marque de Janvier.
Mais, malheureusement, les choses ne s’arrêtèrent pas là, la criminalité augmenta. Plus personne ne se sentait en sécurité, sachant que des dizaines d’espions de Janvier se trouvaient sur leurs terres, tapis dans l’ombre.
Cette situation dura un bon mois avant que les rois de Janvier et Septembre ne se rencontrent dans un champ calme, seul à seul.

 

Là-bas, des discussions se firent, le roi de Septembre s’excusant, mais, il n’y avait plus rien à faire.
« Je n’ai que faire de vos excuses. Vous avez bafoué l’honneur de Janvier, comme si j’étais incapable de m’occuper convenablement de mes citoyens, ainsi, en ce jour, je vous déclare la guerre ! »
- Quoi ? Vous ne pouvez pas ! 
- Bien sur que si. Regardez les événements. »

 

Puis, il tourna les talons, s’en allant paisiblement, comme il était de coutume dans ce monde, chaque partie avait jusqu’au lendemain à midi pour réunir des troupes et les ramener sur le lieu où la guerre fut déclarée.
Ainsi, le lendemain, les deux armées se firent face, celle de Janvier était assez vaste, visiblement prête depuis un moment. Au contraire, celle de Septembre était moins fournie et semblait bien plus effrayée, ne sachant pas à quoi s’attendre. Le climat était au sang et à la terreur, ce que Jiu et Yuè avaient bel et bien compris.
Pourtant, tous restèrent là à se toiser, attendant les 12 coups de la destinée, attendant ce moment quand le douzième coup retentirait pour se jeter dans la mêlée, afin de combattre pour sa patrie, quitte à mourir pour elle.

 

Les troupes s’entremêlèrent alors, hurlant et se précipitant, la mêlée était informe et discontinue. Les soldats de Janvier étaient en surnombre, affluant sans la moindre pitié. Ils étaient là pour vaincre, qu’importe le prix à payer, face à eux, Septembre avait du mal. Beaucoup de mal. Moins nombreux et bien moins belliqueux, les troupes bleues étaient en grande peine, leurs habits se teintaient de la couleur de l’ennemi à chaque blessure. Petit à petit, le champ perdait ses couleurs, sa vivacité et sa vie, étouffé par les rouges.
Pourtant, malgré cette infériorité écrasante des bleus, il n’était pas question qu’ils abandonnent, cela, jamais ! Ils menaient le combat de leur mieux, usant de la ruse. Les jumeaux étaient effectivement redoutables, menant les troupes. L’armée restait puissante malgré son infériorité. Après tout, ils avaient des soldats déterminés et hardis, assoiffés de victoire et d’honneur.

 

A cheval, Jiu et Yuè étaient pris pour cibles. La nation ennemie les voulait morts, afin de couper toute descendance à leur royaume. Effectivement, la mort des héritiers pourrait pousser le royaume au chaos, se retrouvant sans souverain à la mort du roi, à ce moment, tout le monde essayerait de prendre le pas, la guerre se ferait alors d’elle même dans l’enceinte du royaume. Ces conséquences dramatiques, Janvier les avait comprises et prises en considération.
Le poste de roi était tout de même le plus important, ce qui mettait Yuè dans une position extrêmement délicate. Heureusement pour lui, Jiu veillait au grain, prenant garde à surveiller ses arrières.
Tous deux se protégeaient mutuellement, terrassant un nombre conséquent d’ennemis. Grâce au roi et son escouade rapprochée, les dirigeants ennemis avaient été arrêtés, coupant toute communication. Ainsi, Janvier se retrouvait désorganisé et dispersé, face à une armée perfectionnée et ordonnée. Les troupes ennemis fondaient comme neige au soleil, certains s’enfuyant d’autres se rendant, il ne s’agissait certes pas de la majorité, mais, ces abandons permirent à Septembre de reprendre la main, de prendre l’avantage.

 

Cette impression de victoire provoqua une petite euphorie, baissant leur garde quelques secondes, ils ne virent les troupes arriver qu’avec un temps de retard, se retrouvant séparés, encerclés par l’ennemi.

 

Jiu était entraîné vers le nord du champ, alors que Yuè était entraîné vers le sud. Ils se retrouvaient aux antipodes, ne pouvant plus se rejoindre.
L’aîné et futur chef des armées se débrouillait parfaitement. Faisant danser son épée au travers des ennemis, les blessant, voir les tuant. Son habilité lui permettait de se sortir du torrent de soldats. Pourtant, plus il battait de soldats, plus les renforts affluaient.


De son côté, Yuè s’en sortait moins bien, armé de sa fidèle lance, il tentait de garder les ennemis à distance, encerclé par bien trop de personnes. Janvier se montrait bien plus cruel et sauvage envers lui qu’envers quiconque d’autre.

Maintenant séparés, Jiu et Yuè se battaient de leur mieux. Pourtant, le futur roi rencontrait de grandes difficultés, malgré son habilité au combat, les ennemis affluaient en nombre, revenant toujours plus nombreux à chaque mort.

Les lames s’entrechoquaient, les lances se brisaient, les flèches se perdaient. Le nombre de blessés et de morts était de plus en plus élevé. Le sang coulait, teintant le champ de rouge.

 

Soudain, alors que Yuè se battait, il entendit une épée se dégainer avec force. Le son était proche. Bien trop proche. Se retournant, il vit l’arme à quelques centimètres de lui, bien trop proche pour lui laisser la moindre échappatoire. Il attendit alors la douleur, les yeux clos. Pourtant, il n’y eu qu’un bruit sourd, aucune douleur, alors, ouvrant les yeux, il vit son frère face à lui, souriant, et, au sol, le corps du soldat.

 

« Bah alors frangin, on a besoin d’aide ? »

 

Sans même répondre, se souriant juste, Yuè et Jiu se remirent à combattre, de nouveau ensemble. Janvier n’avait presque plus aucun soldat, la plupart morts ou enfuis. Même si le royaume était connu pour la détermination sans faille de son armée, mis au pied du mur, un à un, les soldats n’étaient pas aussi héroïques.

 

Commençant déjà à savourer leur victoire, les soldats de Septembre baissèrent de nouveau leur garde, Jiu et Yuè en premiers. Tout semblait aller pour le mieux.
Mais, une unique flèche fila droit sur eux, à une vitesse folle. Elle toucha le cheval de Yuè. Sous la douleur, celui-ci se cabra, faisant tomber le jeune homme. Mortellement touché, le cheval continuait ses grands mouvements, frappant malencontreusement Jiu et son destrier. Propulsé violemment au sol, l’aîné se retrouva très rapidement écrasé sous sa monture, celle-ci n’arrivait pas à se relever, hennissant de douleur. Deux ennemis surgirent, l’un armé d’un arc l’autre d’une massue. Le second frappa Yuè, l’empêchant de se relever alors que l’archer tuait les chevaux. Jiu se retrouva ainsi écrasé par son cheval, qui avait tout son poids sur sa poitrine, l’empêchant de respirer. Le manque d’oxygène s'ajoutait à ses forces déjà amoindries par la bataille, prisonnier du poids de l'animal. De son côté, le plus jeune frère était roué de coups, ne pouvant pas aider son ainé.

 

Agonisant sous le poids des chevaux qui lui écrasait le torse, empêchant ses poumons de se remplir, empêchant son cœur de battre convenablement, Jiu sentit doucement ses membres s’affaiblir. Le sang ne circulait plus. Sa chaleur corporelle déclina de même, commençant par ses doigts, ses mains, ses pieds. Remontant tout doucement, le privant de toutes sensations dans ses membres, ne lui permettant plus le moindre mouvement, ne sentant plus qu’une sorte de vide, il en pris conscience rapidement, mais, ne pouvant plus réfléchir, son cerveau le brûlait alors que son corps gelait. Jiu n’avait plus le moindre moyen de s’en sortir. Un peu plus loin, assistant à cette scène, impuissant, étant malmené par les ennemis malgré ses tentatives, Yuè l’observa s’éteindre, petit à petit. Il ne remuait plus. Un simple râle était à peine audible alors que le peu d’oxygène qu’il conservait dans ses poumons s’enfuyait, prenant par le même temps la vie du jeune homme.

 

Ainsi, il ne bougea plus, restant raide sur le sol. Face à ce spectacle, le plus jeune ne pu se contenir plus longtemps, sans même s’en rendre compte, il hurla de douleur. Ses cordes vocales le brûlaient, son corps entier le brûlait, et devant lui, il ne voyait plus rien, sa vision se troublait, devenant noire et insensée. Le peu de soldats qui étaient encore dans le champ, aussi bien de Janvier que de Septembre, s’arrêtèrent. Pendant quelques secondes, il n’y eut plus rien d’autre, tout le monde s’était arrêté. Presque définitivement. Le prince venait de mourir.


Jiu venait de mourir.


Satisfaits de cette nouvelle, les quelques soldats de Janvier restant la célébrèrent,. Tandis que ceux de Septembre ne demandaient plus que revanche. Ainsi, les dernières minutes de la bataille firent couler énormément de sang, les derniers soldats de Janvier furent massacrés.

 

Ne laissant plus rien qu’un champ teinté de rouge.

Ne laissant plus rien que le désespoir.

 

Pleurant sur le corps de son frère, Yuè était entouré de soldats partageant la même peine. Le royaume victorieux de Septembre n’était pas à la célébration. Ayant bien trop perdu en si peu de temps.

 

Ainsi la guerre se finit entre leurs royaumes, laissant Janvier bredouille et Septembre amputé de l’un de ses héritiers. 

 

Des suites de ses blessures et accablé de chagrin suite à la disparition de son jumeau, Yuè le rejoignit quelques jours plus tard. 

 

C’est un doux soir de septembre que tout s'acheva.

0 J'aime
Les dernières discussions
Tout afficher >
Pour Nica, dix-sept ans, l'heure est venue de tirer un trait sur son passé. Son rêve est sur le point de se réaliser : u...
Nathanaël Stone a toujours été d'une sensibilité hors du commun. Or le monde auquel il appartient, l'aristocratie anglai...
Surement un de mes derniers posts *snifff* mais ce sera un post joyeux car ce WE, j'ai eu le plaisir d'aller au printemp...

Les membres favoris du mois

Tout afficher >