Un nouveau septembre

D'un geste habitué, il changea la piste qui tournait en boucle sur son MP3, un vieux Led Zep, et sifflota pour tenter d’endiguer sa nervosité. Encore quelques minutes et son sort serait scellé.

 

Ce matin il avait choisi les vêtements qu’il porterait pour la journée avec soin. Il avait mis presque un quart d’heure à caser une mèche rebelle dans son catogan avant de décider que, foutu pour foutu, il était préférable de rester naturel. L’image que lui renvoyait le miroir l’avait fait grimacer et c’est, non sans une boule au ventre, qu’il avait revêtu sa nouvelle veste en cuir qui lui donnait un air un peu rebelle.


Il s’était regardé une dernière fois dans le reflet de la porte d’entrée sans être totalement satisfait. Il avait soupiré en fermant la porte à clé derrière lui quand il avait entendu sa mère lui lancer depuis la cuisine de ne pas partir le ventre vide. Sa mère… Quoi qu’il arrive ce matin, elle serait toujours là…

Le voilà qui partait au bagne. Mar
vin, 17 ans et des brouettes allait faire sa rentrée en première dans un lycée dont il ne connaissait rien. Rien ni personne. Personne. C’est ce qu’il espérait un peu être cette année.

 

La rentrée scolaire était le moment qu’il aimait le moins de l’année et, de manière tout à fait paradoxale, celui qu’il attendait avec le plus d’impatience.
Il se demandait si c’était le cas de tout le monde ? Est-ce que tout le monde se sentait fébrile ? Est-ce qu’eux aussi avaient passé de longues minutes à s’observer sous toutes les coutures avant de prendre le chemin du lycée ce matin ? Est-ce qu’ils avaient changé de pull quatre fois ? Il avait hâte d’y être, comme si, sous cette nouvelle peau de tissu se cachait un jeune homme neuf. Il avait hâte de passer le cap mais savait que tout allait se jouer en quelques secondes. Quelques secondes qui détermineraient l’année à venir.

 

Sac pendouillant à moitié, cheveux à semi rasés, jean à moitié troué, yeux entrouverts. Tout était fait à demi. Même la motivation n’était pas là.


Peut-être était-il le seul à se sentir anxieux ? Peut-être était-il le seul à voir la rentrée comme un grand saut au dessus du vide ? Peut-être était-il le seul gars bizarre à se poser ce genre de questions ? Il regarda autour de lui pour être sûr que personne ne l’observait. Ouais, il était définitivement étrange.

 

Il ne mit pas 10 minutes à faire le trajet qui le séparait du lycée et pourtant il transpirait à grosses gouttes. Il ralentit le pas. Les mains tremblantes, il hésita à allumer une cigarette pour se donner contenance. A la place il les glissa dans ses poches et s’obligea à compter à rebours. C’était un truc de psy. Il paraîtrait que compter à l’envers empêche les pensées parasites. Un truc à la con qui ne marchait pas vraiment. Alors il compta plus fort dans sa tête.


Il aperçu une bande de jeunes qui rigolaient sur le trottoir d’en face et envisagea de faire demi-tour. Comment se fait-on des amis ? Et si jamais ça recommence ? Et si rien de bon m’attend cette année ? Il avait envie de retourner se tapir sous sa couette. Il avait pris sur lui ce matin et maintenant il serrait les poings à s’en blanchir les jointures.


Peut-être qu’il pouvait rentrer ? Après tout ce n’était pas si grave s’il n’y arrivait pas tout de suite… Il s’arrêta brièvement pour passer en revue la totalité des excuses qu’il avait en stock et ricana à l’idée d’annoncer au CPE qu’il ne s’était pas présenté parce qu’il avait été kidnappé par un crocodile mutant au réveil. Quand bien même l’idée était séduisante, il ne pouvait pas sécher le premier jour de la rentrée. Sa mère le tuerait. Enfin non, elle en mourrait de désespoir. Et puis, [modéré], cette année serait peut-être différente des précédentes ? Ça ne pouvait, de toute manière, pas être pire... Il inspira un grand coup en tentant de se convaincre que tout allait bien se passer.

 

Cétait peut-être la même rentrée, mais c’était un nouveau mois de septembre. Un nouveau mois de septembre dans une nouvelle ville. Un nouveau mois de septembre dans une nouvelle ville auprès de nouveaux élèves. Ouais, tout allait bien se passer. Il joua avec le paquet de cigarettes qui habitait le fond de sa poche pendant quelques secondes et poussa le portail en inspirant un grand coup.

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