Un été en colo

            J’avais huit ans. C’était la première fois que je quittais mes parents pour partir en colonie de vacances. L’appréhension le disputait à l’angoisse du départ. La valise chargée dans la soute, je me glissais parmi le groupe d’enfants sans connaitre personne. Aucun visage ne m’était familier, pourtant ils allaient le devenir dans les trois semaines à venir. J’allais vivre la plus formidable aventure de ma courte vie. Trois semaines coupée de la cellule familiale, trois semaines livrée à moi-même.

            Le car roulait de nuit, traversant la France à vive allure sans que je ne puisse me repérer ni voir le paysage. Je dormis peu, ressassant mon angoisse et mon excitation.  Mes parents et mon petit frère me manquaient déjà. J’étais déboussolée et fatiguée.

            Au petit matin, le village et l’internat où nous logerions apparurent dans la brume, nichés dans une vallée verdoyante du Massif Central. Fatiguée, légèrement nauséeuse (l’altitude et le manque de sommeil), je fixais intensément le bâtiment de pierre qui allait devenir le théâtre des meilleures et des plus incroyables vacances de ma vie.

            Alors se succéda sous la chaleur auvergnate une succession de jeux, de sorties, de découvertes, d’amitié et de fous rire. A huit ans, le monde vous appartient pour le peu qu’on vous laisse un peu de liberté et beaucoup d’imagination. Les longues promenades dans la campagne, les baignades dans les petites rivières où l’eau glacée vous saisit et vous paralyse, les grands jeux de pistes en forêt, les veillées, les monos et les chansons chantées à tue tête plus faussement les unes les autres et incroyablement entêtantes, et surtout les copains : Marie et sa sœur Sophie, Amélie, Jerome, Benoit son cousin, Alexandre et Martin.

            Trente ans après, je n’ai oublié aucun prénom ni aucun des visages qui colorèrent ces trois semaines.