Anima
Wajdi Mouawad
Noir, tranchant, et froid comme l’obsidienne, brillant comme elle. Tel peut être qualifié ce roman portant ce nom latin qui signifie souffle ou âme, et qui a donné sa racine au mot « animal ». Plonger dans cette histoire, c’est vivre une expérience littéraire profondément singulière, frotter son âme aux noirceurs les plus infâmes de l’humanité, et pourtant y voir une infime lueur qui fait espérer autre chose. Cette lecture ne conviendra pas à tout le monde. Certaines pages versent dans l’horreur absolue, les plus effroyables cruautés humaines. Cependant, la démarche de l’auteur convainc de la nécessité de décrire l’indescriptible, car l’indescriptible est une réalité qui jaillit de la fiction.
Wahhch Debch est un homme anéanti par la douleur depuis qu’il a découvert le cadavre de sa femme assassinée, odieusement mutilée et souillée. Elle portait leur enfant. Mais Wahhch Debch n’éprouve aucun désir de vengeance, seulement l’impérieux besoin de voir le visage de celui qui a pu commettre pareil crime, pour se convaincre que ce visage n’est pas le sien. Il entame alors une périlleuse odyssée entre le Québec et les États-Unis, sur la piste du meurtrier de sa femme, un Indien d’une férocité sans mesure, qui se cache parmi les siens et pourtant ne craint rien ni personne. Cette quête fait resurgir en Wahhch les terribles souvenirs enfouis de sa petite enfance, lui l’enfant enterré vivant, l’enfant adopté, miraculeux survivant du massacre de Sabra et Chatila durant la Guerre du Liban.
L’originalité première de ce roman est qu’il est raconté à la première personne par une multitude de narrateurs, tous des animaux. Chaque chapitre porte le nom latin de l’animal qui assiste à la scène, et l’auteur démontre l’étendue de son habileté narrative en conférant à ces bêtes, insignifiantes, élégantes ou sauvages, des voix singulières au style marqué. Ce récit à la plume remarquable, teinté de spiritualité animiste, est une ode au regard et à l’innocence de ceux qui ne sont pas nous, un réquisitoire contre la terrible violence qui dévore les entrailles et la raison de l’Homme. Une lecture éprouvante qui creuse profondément sa trace.
Avertissement :
Anima : Wajdi Mouawad - 2330052960 - Livres de poche | Cultura
@dvall il est dans ma bibliothèque. J’ai craqué aussi pour la couverture et je suis fan des romans Babel. J’espère que j’accrocherai à l’histoire.
Moi aussi, je suis fan des romans Babel, @clo73. Je ne crois pas avoir déjà été déçu par un livre de cette collection. Concernant "Anima", il vous faudra avoir le cœur bien accroché pour plonger dans cette lecture. La dernière page de la BD "Le Petit Peuple", qui vous avait marquée par sa violence, c'est de la roupie de sansonnet à côté...
La couverture m'a interpellé aussi, belle et mystérieuse. C'est une photographie de Nadia Maria, une photographe brésilienne. Etonnamment, lorsque j'ai acheté le livre, je n'avais vu que le visage de femme. Ce n'est qu'en rentrant chez moi que j'ai aperçu celui du chien-loup juste au-dessus...
@dvall hate de le lire 😊
Je lis souvent des livres avec des scènes difficiles ou choquantes, cela ne me dérange pas car je suis une adulte, et d’ailleurs c’est ce que je recherche dans mes lectures, à être bousculer…
J’ai été dérangée par la dernière page de Un petit peuple uniquement parce que ce livre s’adresse aux enfants et que je ne pense pas que cela apporte de l’intérêt ou de la pertinence à l’histoire.
Je comprends, bien sûr. On ne peux pas comparer une BD pour enfants avec un livre pour adultes (bien) avertis. Je suis donc impatient de savoir ce que vous penserez d’Anima, @clo73. Certaines pages figurent parmi les plus difficiles que j’ai lues. J’ai vu certaines critiques reprochant à l’auteur une certaine fascination pour la violence et l’horreur. Nous pourrons débattre sur leur légitimité une fois que vous aurez lu « Anima ».
Merci pour le partage, @clo73. Je constate que le seul que nous avons en commun est justement "Anima". "Imago" me tente beaucoup, tout comme cette biographie romancée sur Jean-Michel Basquiat. Lequel me conseilleriez-vous plus particulièrement parmi ceux de votre collection ?
Dans ceux de ma liste, il n'y a que "La Guerre des jours lointains" et "Aux animaux la guerre" que je n'ai pas encore lus.
J'ai également lu "Incendies" de cet auteur, un extraordinaire souvenir de lecture comme Anima
Voici mon avis :
http://leslivresdejoelle.blogspot.com/2017/02/anima-de-wadji-mouawad.html