Crépuscule
Philippe Claudel
Comme souvent, Philippe Claudel sait peindre des tableaux de contrées lointaines saisies de givre et de vent, cartographier les territoires de viles manigances, tout en charriant à pleines brassées les noirceurs de l’âme humaine. Car les humains dans ses histoires sont toujours gouvernés par leurs bas instincts, qu’il s’agisse de stupre, d’avidité ou de vain ego. De petits puissants se débattent dans leurs minables existences, avec leurs secrets, leurs pulsions et leurs mensonges, n’épargnant ni la vérité ni les innocents. L’écriture est belle, tantôt charnelle tantôt minérale, apte à décrire d’orgiaques ripailles ou de viriles expéditions chasseresses, tout comme la simple poésie du vivant ou des cœurs sincères. Au charme des descriptions s’ajoute le contrepoint d’une réflexion sur la nature humaine et les malfaçons de l’Histoire.
Dans une province reculée de l’Empire existe une petite communauté où les Mahométans vivent en bonne entente avec les Chrétiens, où l’église jouxte la mosquée sans que quiconque ait à se plaindre. Mais lorsque le Curé est retrouvé gisant, le crâne fracassé à coups de pierre, les soupçons se portent sans tarder sur la communauté musulmane. Nourio le Policier, tout autant malmené par ses appétits sexuels que par son ambition de petit fonctionnaire aspirant à davantage de reconnaissance, doit mener l’enquête avec son Adjoint Baraj, doux colosse taiseux et solitaire goûtant le bonheur des choses simples. Si le meurtre du Curé réveille des haines endormies au sein de la petite ville anesthésiée par le froid, il produit aussi des remous en forme d’aubaine dans certains esprits ignobles et manipulateurs. Peut-être l’Empire a-t-il une carte à jouer dans ce jeu de dupes…
Les personnages de cette histoire sont habilement croqués. Le trait est épais et noir, les contrastes savamment portés, notamment chez le Policier à la personnalité complexe dont on se demande jusqu’à la fin s’il parviendra à lutter contre ses pulsions abominables pour faire éclater la vérité. Mais lui-même reconnaît l’idée d’une vérité efficiente en ce monde, dont souvent s’accommodent les puissants et ceux qui écrivent l’Histoire.
@dvall , merci pour ce retour de lecture d un livre qui est en bonne place sur ma liste.
@dvall Merci pour ta chronique qui donne envie de découvrir ce roman. Un livre qui semble beaucoup plaire aux lecteurs.
Ravie d'avoir eu ton avis @dvall . J'ai mis ce roman sur ma liseuse ce WE, et je compte bien le lire le mois prochain. Je reviendrai ensuite avec ma chronique.
@dvall @soff78 @CharlotteV @clo73 @Katili
J'aime beaucoup l'écriture de Philippe Claudel. J'ai commencé la lecture de ce roman le mois dernier. Je l'ai reposé au bout de 50 pages environ. Je crois que je n'étais pas du tout dans le "mood" pour cette atmosphère. Mais j'entends bien en reprendre la lecture d'ici quelques semaines.
D'ailleurs, la même chose est arrivée à une membre de mon club de lecture. Elle l'a abandonné puis repris et finalement l'a trouvé formidable.
L’atmosphère des romans de Philippe Claudel est toujours sombre et pesante, alors je comprends que certain.e.s lecteur.rice.s doivent se trouver dans le bon « mood » pour les aborder, @MAPATOU. J’espère que vous pourrez vous replonger dans « Crépuscule » avec l’état d’esprit adéquat. De mon côté je n’avais pas adhéré au roman intitulé « L’enquête », du même auteur. L’as-tu lu ?
Et vous, @soff78 @CharlotteV @clo73 @Katili, quels sont les romans de Philippe Claudel que vous avez apprécié (ou pas) ?
@dvall , j ai lu" Les âmes grises" et " Le rapport Brodeck".
Je lis mais je réussis à mettre l histoire à distance si besoin.