L’action de ce court roman (ou longue nouvelle) se déroule à bord d’un paquebot quittant New York pour Buenos Aires. Le narrateur y décrit la rencontre que lui et d’autres gentlemen font avec le champion du monde en titre du jeu d’échecs qui accepte, moyennant rétribution, de disputer une partie contre eux. Le champion apparaît comme un être froid, incroyablement condescendant et infatué de sa personne, capable de battre à plate couture et sans aucun effort tous ces amateurs rassemblés devant lui. Mais un étrange et discret monsieur qui dit n’avoir pas touché aux pièces d’un jeu d’échecs depuis vingt-cinq ans va faire irruption et bouleverser le cours d’une partie qui semblait jouée d’avance. Le champion sera mis pat et proposera une nouvelle rencontre le lendemain, ce qui laisse au narrateur le temps d’en découvrir un peu plus sur ce mystérieux monsieur et ce qui lui a permis de développer ses étonnantes capacités…
D’une manière habile et élégante, Stefan Zweig évoque les exactions nazies à l’aube de la Deuxième Guerre Mondiale, les méthodes d’interrogation et de torture psychologique en usage dans la Gestapo, les formidables ressources adaptatives de l’esprit humain quand il devient « esclave du néant », la manière dont le génie peut s’abîmer dans la folie, mais aussi et surtout ce qui sommeille au fond de soi, jamais éteint et toujours prêt à resurgir, quand on a connu le fouet d’une servitude.