Pierre Lemaitre
Enfin nous les retrouvons, les membres de la famille Pelletier, dont nous avions suivi pérégrinations libanaises et indochinoises dans Le Grand Monde, le tome précédent de la trilogie. Les enfants ont définitivement coupé les ponts avec le Liban de leur enfance et la savonnerie paternelle, pour faire carrière dans le journalisme pour deux d’entre eux et dans le commerce pour Jean, dit Bouboule.
Leurs vies sentimentales ne manque pas d’intérêt : Jean est affublé d’une épouse archétype la mégère, enceinte et titrant partie de cette situation pour limiter sa participation à la vie familiale aux coups de gueule après la terre entière. Odieuse, acariâtre, et rusée, un personnage que l’on aime détester.
Hélène est focalisée sur l’histoire du barrage de Chevrigny (nom de scène de l’histoire de Tignes) tientt un journal de bord du compte à rebours avant l’inondation du village, tissant ainsi des liens avec la population locale et avec un photographe lui aussi présent sur les lieux.
Quant à François, il vit une relation complexe avec Nine une jeune femme malentendante.
Pierre Lemaître fait aussi le point sur la situation des femmes à une époque où la contraception se limite à l’inefficace méthode Ogino, ne laissant pas de choix autre que de recourir à l’avortement toute illégalité.
En filigrane, l’enquête sur le meurtre d’une jeune femme dans un train, dont seul le lecteur connaît le lien avec d’autres meurtres perpétrés plus tôt …
Pendant ce temps à Beyrouth, Le père Pelletier soutient un jeune boxeur peu talentueux mais lié à cette famille.
Un vrai régal comme d’habitude. A la fois pour l’aspect historique et social, et pour le suspens créé par les péripéties de la famille. On n’attend pas forcément une performance littéraire, mais une bonne histoire aux points d’accroche multiples..
592 pages Calmann-Lévy, 10 janvier 2023
Geneviève trouvait très chic d’établir un plan de table même pour un repas familial. Elle n’allait pas jusqu’à poser un carton devant chaque assiette, mais prenait un vif plaisir, du fond de son fauteuil, les mains croisées sur le ventre, à assigner les places d’une voix de mourante :
— François, mon chou, je peux te demander de t’asseoir ici, à côté de moi ? Tu seras en face de ta sœur et on mettra Colette à sa droite. Ma chérie (elle se tourna alors vers Nine), je ne veux pas te séparer de ton cher et tendre, installe-toi là. Toi, Bouboule, tu te mets ici.
N’importe quel observateur aurait remarqué que les places étaient rigoureusement les mêmes que la fois précédente.
Pierre Lemaitre est un écrivain et scénariste français.
Fils d'employés de sensibilité politique de gauche, il passe son enfance entre Aubervilliers et Drancy.
Psychologue de formation, et autodidacte en matière de littérature, il effectue une grande partie de sa carrière dans la formation professionnelle des adultes, leur enseignant la communication, la culture générale ou animant des cycles d'enseignement de la littérature à destination de bibliothécaires. Il se consacre ensuite à l'écriture en tant que romancier et scénariste, vivant de sa plume à partir de 2006.
Merci pour cette chronique @Kittiwake Je n'ai lu que Le serpent majuscule et j'ai bine aimé.
Merci pour cette chronique @Kittiwake, le moins qu'on puisse dire c'est que ce roman cartonne depuis plusieurs semaines !
Quel roman !
Encore un coup de coeur pour ce nouveau roman de Pierre Lemaitre.
Une histoire foisonnante, passionnante, qui vous tient en haleine durant toute votre lecture.
Comme dans le tome précédent, et je crois même que celui-ci est encore plus enthousiasmant, les histoires dans l’Histoire sont enrichissantes, romanesques et étonnantes.
Dès les premières pages, j’ai eu l’impression d’avoir quitté la famille Pelletier il y a quelques jours… alors que j’ai dévoré Le grand monde il y a presque un an !
Retrouver Jean et sa peste d’épouse Geneviève, François et la mystérieuse Nine, Hélène la sœur reporter/photographe et les parents Louis et Angèle, fut un vrai bonheur.
Suivre leurs vies, les hauts, les bas, les joies , les drames. Être choquée, rire, voir arriver les ennuis, ressentir de la compassion…
Tout cela au plus près de l’Histoire richement illustrée et documentée.
Depuis Au-revoir la haut je ne manque aucun des romans de cet auteur.
J’adore son écriture fluide, fascinante, savoureuse et addictive.
Sachez qu’en ouvrant ce livre vous vivrez l’ouverture d’un grand magasin, vous suivrez le combat d’habitants d’un village appelé à disparaître sous les eaux, vous côtoierez un « serial Killer »…
Tout cela dans la France des années 50 en plein essor mais toujours figée dans ses certitudes, dans ses habitudes !
Un roman social, réaliste, populaire plein d’humanisme et d’émotions et d’un qualité d’écriture indubitable.
Le silence pour toutes ces femmes menacées de prison en cas d’avortement, mais aussi le silence des secrets et des non-dits.
La colère qui fait souvent suite à ces silences, mais aussi une colère pour toutes les exploitations, les maltraitances et les souffrances !
Un roman coup de coeur et une admiration pour cet auteur pour son écriture, son incroyable imagination et son talent !❤️
L’attente va être longue avant de lire la suite 🥺
Second volet sur les trente glorieuses, Paris, Tignes, la Bourgogne, les Ardennes, la naissance d'une nouvelle société françaises qui frappe les protagonistes, cette histoire est rythmée, construite habillement afin de nous emporter dans un tourbillons grâce à la plume d'un virtuose en la personne de Pierre Lemaitre.
Après un « Le grand monde » palpitant, peut-être le meilleur livre en littérature blanche de Pierre Lemaître, je ne cachais pas mon impatience de découvrir le deuxième volet de la trilogie.
Le plaisir principal réside bien sûr dans le fait de retrouver les Pelletier. Cette famille folklorique, dont tous les membres sont hauts en couleur, nous entraînent à leurs côtés dans le monde de l’après-guerre. Ils ont des caractères différents, des vies différentes et déclenchent des situations étonnantes. Certains personnages sont attachants et on entre en empathie avec eux. Et d’autres sont tellement antipathiques qu’ils en deviennent captivants. Cet éventail d’individus donne à l’histoire une énergie folle qui empoigne le lecteur pour ne plus le lâcher.
Pour ce nouvel épisode, comme les acteurs principaux sont déjà placés, bien ancrés dans notre mémoire, l’action peut commencer sans préliminaires. On reprend les protagonistes là où on les a laissés. Cette fois-ci, le scénario est surtout concentré sur ceux qui étaient moins utilisés auparavant, Hélène et François. Leurs destins chaotiques permettent à l’auteur de traverser différents sujets de l’époque. Il peut alors nous proposer un tableau général, reflet des préoccupations de ces années post seconde guerre mondiale. La lutte des classes, l’avortement, les relations hommes/femmes, sont autant de thèmes qui ont traversé cette époque et que l’écrivain nous dépeint avec talent.
Moins surprenant que le précédent, « Le silence et la colère » n’en reste pas moins un modèle de narration. Pierre Lemaître est devenu un des représentants principaux du réalisme moderne, capable de nous parler de la petite Histoire en donnant une dimension sociale aux péripéties de ces personnages. Il manie avec dextérité les mots, les rebondissements et le côté feuilletonnant de ses aventures. Dès que vous entrez dans son univers, vous en pouvez plus en sortir, exalté par cette immersion passionnante. Du grand roman populaire !
https://leslivresdek79.wordpress.com/2023/04/17/841-pierre-lemaitre-le-silence-et-la-colere/