Romanée-Conti 1935 (suivi de Le Monstre et les cure-dents)
Kaikô Takeshi
Voici deux nouvelles d’un auteur japonais globe-trotter dont la curiosité pour les pays étrangers et d’autres cultures se retrouve aisément dans l’écriture. Kaikô Takeshi fut romancier, essayiste, critique littéraire, et même correspondant de guerre pour un fameux journal japonais. Les deux nouvelles présentées ici nous emmènent respectivement en France et au Vietnam.
« Romanée-Conti 1935 » débute un après-midi d’hiver dans le restaurant d’un gratte-ciel d’acier et de verre à Tokyo. Deux amis quarantenaires, l’un administrateur d’entreprise, l’autre romancier, s’apprêtent à déguster deux bouteilles exceptionnelles de Bourgogne Romanée-Conti, dont l’une est millésimée 1935. Au cours de cette dégustation presque cérémonielle alterneront considérations œnologiques d’une grande élégance et souvenirs personnels, comme remontés depuis les tréfonds de la mémoire grâce à ce vin aux effets de madeleine de Proust. Le romancier se remémorera ainsi l’époque où il logeait dans le Quartier latin à Paris, sa rencontre avec une femme dénommée Gunvor, la sensualité partagée… Lui et son ami boiront le vin et les souvenirs jusqu’à la lie.
« Le Monstre et les cure-dents » se déroule au Vietnam, durant la Guerre des dix mille jours comme l’appellent les Vietnamiens. Le narrateur est un journaliste qui croise à trois reprises le général B., un personnage aussi atypique qu’effrayant. Cet homme, dont le physique monstrueux évoque un croisement entre le vautour et la grenouille, est toujours accompagné de gardes du corps. C’est un personnage haut placé de la police secrète chargée de l’organisation militaire dans le secteur Saïgon/Gia-dinh. Un homme influent et sans pitié, que tout le monde craint ou respecte. Le narrateur va éprouver pour cet homme une fascination persistante, que le destin ne tardera pas à combler de la plus étrange des façons.
J’ai apprécié ces deux nouvelles au style impeccable, jouant d’une belle sensibilité poétique pour la première, et d’une acuité un peu cynique pour la seconde. L’une et l’autre évoquent le passage du temps et l’émoi du présent, ce qui s’écoule et ce qui se dégrade.
Romanée-conti 1935 : Takeshi Kaiko - 2809712360 - Livres de poche | Cultura
Je vous en prie, @maelle-cultura. Permettez-moi de préciser que l'illustration de première de couverture est un détail (inversé) d'un tableau du Caravage, "Bacchus", pour lequel son grand ami Mario Minniti a posé. C'est même cela qui m'a attiré vers ce recueil...
Ah je ne savais pas ! Merci beaucoup pour cette précision.