Tyrannicide

‎02-05-2016 15:35

Tyrannicide

Dans Tyrannicide, l’expéditeur destine une lettre à Philippe Sollers, directeur de la collection « Blanche » chez Gallimard, mais en s’adressant à Sollers, il s’adresse aussi à l’auteur. Dans cette lettre, l’expéditeur répond à une lettre de refus de son manuscrit.

Dans Tyrannicide, l’expéditeur destine sa lettre à Philippe Sollers, directeur de la collection « Blanche » chez Gallimard, mais en s’adressant à Sollers, il s’adresse aussi à l’auteur. Dans cette lettre, l’expéditeur répond à une lettre de refus de son manuscrit.

 

Cela fait six fois qu’il remanie et envoie son manuscrit à la Blanche. Il s’obstine à vouloir être édité uniquement dans cette édition et recherche l’aval de Sollers qui sans cesse le lui refuse. Tout en revenant sur le pourquoi et le comment de son roman, il s’en prend de plus en plus à Philippe Sollers lui-même.

Force m’est de constater que votre réputation de mandarin égocentrique des lettres françaises n’est pas usurpée, Philippe Sollers. (p.19).

Entre besoin de reconnaissance et rancœur, l’expéditeur apparaît, au fil des pages, de plus en plus étrange et laisse percevoir une personnalité pour le moins particulière. Au début du texte, on est du côté de l’expéditeur contre un Philippe Sollers que l’on connaît soi-même comme assez hautain et esthète, et les griefs qu’il reproche à l’auteur reconnu nous paraissent justifiés. Mais la force de ce texte est que nous plongeons de plus en plus dans la personnalité de l’auteur refusé : est-il vraiment incompris ou est-il réellement un mauvais auteur ?

Ce texte peut apparaître comme une critique de l’édition relatant les aléas d’un auteur anonyme tentant d’obtenir le fameux sésame, il peut être aussi une critique des maisons d’édition ayant pignon sur rue, dirigées par des hommes ayant la carte du petit monde germanopratin. Et en effet, il y a de cela dans ce texte. Mais la grande originalité de Giulio Minghini est qu’il manipule son lecteur et que les deux personnages de son livre ne sont ni tout blancs ni tout noirs. Petit à petit, on finit par se dire que les refus de Phillippe Sollers ne sont peut-être pas si infondés que cela et finalement on commence à penser que Giulio Minghini opère ici une critique de tous ces pseudo-auteurs, sûrs de leur talent méconnu et qui, à force de refus, en deviennent aigris : Je suis navré que vous n’ayez pas perçu son potentiel cinématographique. Navré pour vous, j’entends. Vous manquez drôlement de flair, Monsieur Sollers. (p.62).

L’obstination du l’expéditeur d’être publié dans la Blanche est aussi une volonté d’être reconnu par Philippe Sollers lui-même. Plus que la volonté d’être édité, il me semble que cet auteur refusé cherche avant tout à être apprécié de l’auteur reconnu auquel il voue une admiration qui vire à la haine. Il a beau rappeler les erreurs passées de Gallimard qui refusa Marcel Proust (et donc s’assimiler à ce dernier), cet être à la vie déprimante et petite, court après une reconnaissance littéraire qui cache une reconnaissance personnelle, d’autant que ses manuscrits s’inspirent de sa propre existence.

Un texte qui déstabilise puisqu’il n’est pas ce qu’il laisse supposer, mais un texte intéressant cependant qui conduit à nous interroger. Reste à savoir ce que Philippe Sollers pense de tout cela !



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