La couverture du film fait pensée au film the Wretched. Livre nominé au prix Fémina des lycéens et Prix Fémina et sélection prix des Lecteurs 2021
Résumé :
« Un esprit de la forêt. Voilà ce qu’elle avait vu. Elle le répéterait, encore et encore, à tous ceux qui l’interrogeaient, au père de Lucy, avec son pantalon froissé et sa chemise sale, à la police, aux habitants de la réserve, elle dirait toujours les mêmes mots, lèvres serrées, menton buté. Quand on lui demandait, avec douceur, puis d’une voix de plus en plus tendue, pressante, s’il ne s’agissait pas plutôt de Lucy – Lucy, quinze ans, blonde, un mètre soixante-cinq, short en jean, disparue depuis deux jours –, quand on lui demandait si elle n’avait pas vu Lucy, elle répondait en secouant la tête : "Non, non, c’était un esprit, l’esprit de la forêt." »
Dans une région reculée du monde, à la lisière d’une forêt menacée de destruction, grandit Nita, qui rêve d’ailleurs. Jusqu’au jour où elle croise Lucy, une jeune fille venue de la ville. Solitaire, aimantant malgré elle les garçons du lycée, celle-ci s’aventure dans les bois et y découvre des choses, des choses dangereuses
Avis :
Éden est un roman sur l’adolescence, la solitude, la perte, la recherche de ce qu’on est. On y retrouve des similitudes des précédents livres de l'auteur à savoir des disparitions d'enfants, d'ados et d'adultes inquiétantes prés des lacs ou des fôrets. La faute, le châtiment et le lien aux origines sont au cœur de ce roman envoûtant sur l'adolescence et ses métamorphoses. Éden, ou le miroir du paradis perdu. Monica Sabolo d'explore les douloureuses métamorphoses de l'adolescence, elle dénonce la domination masculine, dans une fable écologique, sensuelle et violente, proche du fantastique.
Autres :
« Éden est un roman tellurique, plein de bruits, d'odeurs, de fureurs, de désir et de force.
On lit Éden en apnée et on en ressort ébloui, hanté. »
AUDREY PETIT, DIRECTRICE ÉDITORIALE Livre de poche
Mon retour sur ce roman :
J'avais découvert Monica Sabolo avec son précédent roman "Summer" en 2017.
J'ai retrouvé dans "Eden" des thèmes qui lui paraissent chers : l'adolescence, ses tourments, la disparition, la nature et notamment la forêt qui tient dans ce roman une place prépondérante.
Lucy, 17 ans, vient s'installer avec son père dans ce qui fut une ancienne caserne de pompiers en lisière d'une réserve indienne.
Elle fréquente le lycée où les élèves sont en grande majorité autochtones. Elle n'a pas réellement d'amis mais parle de temps en temps à la jeune narratrice, Nita, qui prend le même bus scolaire qu'elle.
Au bout de quelques semaines, Lucy disparaît pendant deux jours. Quand on la retrouve inconsciente à l'orée de la forêt, elle est entièrement nue, recouverte de terre et semble avoir été violée.
Nita va alors remonter le cours du temps pour tenter de comprendre ce qui s'est réellement passé car Lucy est prostrée, mutique et ne peut révéler le nom de son ou ses agresseurs.
C'est ainsi que l'on découvre que la jeune fille aimait se rendre dans la forêt la nuit, là où, disait-elle, agissent les "Esprits". Il faut dire que cette forêt profonde qui jouxte la réserve est menacée de destruction par l'industrie pétrolière.
Des hommes y travaillent toute la journée, arrachant et coupant les arbres. le soir venu, ils investissent le seul pub du coin où l'alcool coule à flots. Les nuits sont devenues dangereuses près de la réserve : viols, disparitions de femmes. La police n'est pas très diligente à retrouver les coupables...après tout, il ne s'agit que de femmes indiennes.
Alors, les femmes sont parfois obligées de se faire justice elles-même.
J'ai profondément aimé l'ambiance de ce roman, les portraits psychologiques de ces adolescents confrontés à la dureté de la vie de cet endroit, les descriptions de la forêt qui semble si mystérieuse, attirante et tout à la fois effrayante :
"Je me souvenais des arbres fantômes. On disait qu'il existait une forêt invisible, constituée par la mémoire des arbres disparus. A leur mort, les spécimens les plus anciens, les plus majestueux, demeuraient vivants dans l'autre monde. Leurs racines continuaient de pousser, créant un réseau secret et sinueux qui s'étendait sous la surface de la terre à la façon d'un filet de cordes noires. Là où s'était dressé leur tronc s'ouvrait une faille dans l'espace et le temps, où l'on pouvait s'insinuer, comme par une trappe, et pénétrer le territoire des esprits. On pouvait aussi se tenir là, à la frontière entre le visible et l'invisible, et disparaître aux yeux de toute créature vivante. On disait encore que c'était par les portes des arbres fantômes que les esprits des morts s'introduisaient dans notre monde, sous une forme animale."
Si vous ne connaissez pas encore l'univers et l'écriture de Monica Sabolo, lisez vite ce roman pour les découvrir.