Je ne suis pas un g.a.y. de fiction - Naoto Asahara

‎18-10-2019 14:37

Je ne suis pas un g.a.y. de fiction - Naoto Asahara

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Les éditions Akata ont un catalogue très intéressant, ils proposent aussi bien des mangas que des romans, et les thèmes abordés sont particuliers, sensibles, différents… J’avais déjà eu un coup de cœur pour Ce qu'il n'est pas, qui parle entre autre de transidentité et d’acceptation de soi et des autres. C’est une maison d’édition que j’aime beaucoup, et qui vient de grimper dans mon top 5 grâce à leur prochaine sortie : Je ne suis pas un g.a.y. de fiction, qui sera disponible le mois prochain, et qui est un nouveau coup de cœur.

 

Ce roman parle d’un jeune homme, homosexuel qui n’a pas fait son coming-out, et de son quotidien difficile. Il vit caché, personne ne sait ce qu’il ressent à part son amant et un mystérieux ami avec qui il ne discute que par internet. Un jour une de ses camarades de classe qui adore les histoires entre garçons va tomber amoureuse de lui, sans remarquer qui elle a réellement face à elle.

 

J’ai eu ma première expérience avec le Yaoi, ou le Boy’s Love, les romances entre hommes, quand j’étais encore au collège. Ma grande sœur était fan de l’anime Gundam Wing c’est elle qui m’a initiée aux mangas, aux anime et au Japon, et je l’en remercie pour ça Smiley très heureux. Gundam c’était une passion pour elle, et c’est aussi grâce à ça et à elle que j’ai connu les fanfictions, et notamment les fanfics Yaoi. Les plus populaires à l’époque étaient celles mettant en scène Trowa et Quatre. Et je dois dire que l’idée me plaisait bien, les personnages allaient bien ensemble, ils étaient vraiment mignons. Depuis je ne suis pas insensible aux histoires MM. Je trouve les romances LGBT+ plus intéressantes à lire que les traditionnelles. Je sais néanmoins que pour certaines personnes le Yaoi est une véritable passion, et que ce phénomène est assez fréquent au Japon. Je l’ai d’ailleurs appris dans ce roman mais il existe un terme pour qualifier les femmes qui sont fan de Yaoi : les fujoshis. Alors que ressent-on lorsqu’on est un homosexuel qui évolue dans un pays où les relations entre hommes sont admirées et fantasmées, mais que les homosexuels réels sont rejetés et jugés ? Que ressent-on lorsqu’on entend ses camarades dire à quels point ils aiment les homos, en sachant qu’ils risquent de vous rejeter si vous leur avouez qui vous êtes réellement ?

 

Ce livre écrit à la première personne essaie de répondre à ces questions. On suit Jun et ses pensées à travers tous ces obstacles qu’il va devoir affronter. Ce choix de point de vue est très judicieux, on s’implique et on s’immerge immédiatement dans l’histoire et dans sa vie, et on ressent une empathie pour lui très rapidement. Parce que bien qu’il y ait des moments positifs dans cette histoire, c’est surtout de tristesse et de souffrance qu’est composée la vie de Jun. Tout est une épreuve pour lui. Les petites choses du quotidien qui nous semblent banales se transforment parfois en véritable obstacle pour lui. Parce que personne ne sait qui il est vraiment. Parce qu’il se cache, constamment. Il n’ose pas révéler à sa famille, à son ami d’enfance et à ses camarades qui il est, ce qu’il ressent, ses envies. Je ne sais pas comment ça se passe précisément au Japon, ni comment la communauté LGBT+ est perçue là-bas. Mais quand on voit les épreuves que traversent les gens un peu différents ici, dans un pays comme la France, considéré comme « moderne », comment ils sont jugés, maltraités, battus… je ne peux qu’imaginer ce que ça doit donner dans un pays plus traditionnel comme le Japon. Jun a peur d’être jugé, rejeté par tout le monde, et il se force à mentir, à se juger lui-même, et à se détester. Les sociétés devraient inciter les gens à s’accepter tels qu’ils sont, et à être toujours bienveillants avec les autres. Si c’était le cas Jun assumerait qui il est. Il pourrait sortir avec des hommes au grand jour, se marier et fonder une famille avec un homme, et en parler à tout le monde, comme on parle de sa femme à ses collègues ou à sa famille. Mais ce n’est pas le cas. Jun a grandi avec l’idée qu’être « normal » c’est être capable de faire l’amour à une femme. Et il n’en est pas capable. Il se trouve anormal, il se dégoûte, il se déteste. C’est très dur à lire. C’est difficile de lire des pensées comme ça, surtout lorsqu’elles sont dirigées vers sa propre personne. Son auto-jugement est dur, inflexible. C’est très triste et j’ai éprouvé énormément de peine et de tristesse pour lui. Ses envies et ses besoins sont les mêmes que la plupart des gens. Il rêve par exemple de fonder une famille et d’avoir des enfants. Mais selon lui la seule façon d’y arriver est de se marier avec une femme, et d’avoir des enfants avec elle, ce qui est contre sa nature. Jun en vient à prendre des décisions qui le feront souffrir, lui et son entourage. Il essaie à tout prix d’être « normal », et en vient à se rejeter lui-même. C’est horrible, mais c’est malheureusement la réalité pour lui et pour des milliers d’autres personnes dans le monde.

Ce roman est parfois difficile à lire parce que les pensées de Jun sont atrocement dures. Il est tellement sévère avec lui-même, il se déteste… J’ai vraiment été touchée par cette histoire et par Jun, et ce livre est un vrai coup de cœur pour moi. Je l’ai lu en deux jours (et si je n’avais pas été obligée de travailler le premier je l’aurais dévoré d’une traite ^^), je ne pouvais pas le poser avant de savoir ce qui allait se passer pour Jun. Il lui arrive beaucoup de choses, parfois négatives, très négatives. On se laisse emporter par le tourbillon des événements et on veut savoir comment il va s’en sortir. Va-t-il faire son coming-out ? Et auprès de qui ? Sera-t-il accepté, rejeté ? Arrivera-t-il à assumer qui il est ? C’est très bien écrit et on fait défiler les pages sans s’en rendre compte. Si Jun est extrêmement attachant, les autres personnages ne sont pas en reste. Miura est une vraie bulle de bonne humeur et d’air frais. J’ai beaucoup aimé son personnage. Loin d’être une jeune lycéenne fragile, elle sait ce qu’elle veut et n’hésite pas à tenir tête à ses camarades et à Jun. Elle a un grand cœur, le rire facile, et la capacité d’accepter et d’aimer les gens tels qu’ils sont. Un personnage adorable. Ryôhei, l’ami d’enfance de Jun, m’a beaucoup plu. Il est un peu bizarre et a des délires particuliers, mais il est généreux, attentif et c’est un bon ami. Et enfin Mr. Fahrenheit, un personnage qu’on ne rencontrera jamais réellement. Il est mystérieux, sensible, plein de sagesse, et son histoire m’a beaucoup émue aussi. Avec ce personnage l’auteur va évoquer un autre sujet sensible: les MST. C’est un sujet qui amène souvent pas mal de préjugés sur l’homosexualité, et c’était bien de faire un petit topo et une piqûre de rappel par la même occasion. Ce livre défonce dénonce les préjugés et idées reçues dans tous les sens, et ça fait du bien. Il nous questionne également sur l’image des hommes et des femmes dans la société, parle de suicide, d’adultère… autant de sujets différents et sérieux qui font de ce roman une oeuvre engagée, une histoire pour questionner, se remettre en question, et un appel à la bienveillance.

 

J’ai vraiment aimé ce livre, je compte me le procurer en format papier pour la fin de l’année. C’est une oeuvre complète, qui nous questionne et nous ouvre les yeux sur notre propre attitude. Je me fiche de savoir si la personne en face de moi est hétéro, bisexuelle, homo ou même asexuelle, et si cette personne venait à m’en faire la confidence, j’aurais tendance à lui répondre que je m’en fiche, que ça n’a pas d’importance à mes yeux. Mais est-ce la bonne réponse ? Oui je l’accepte telle qu’elle est, mais ne devrais-je pas aussi lui dire que j’apprécie son aveu, et lui demander comme elle le vit au quotidien ? On n’a jamais vraiment idée des épreuves que traversent les gens, et les réponses qui nous semblent les bonnes le sont-elles réellement ? Nous intéressons-nous assez aux personnes qui nous entourent chaque jour ? Je ne suis pas un g.a.y. de fiction m’a émue aux larmes, m’a troublée, et j’y pense encore après ma lecture. Ce roman ne nous laisse pas indifférent (si c’est le cas remettez-vous vite en question), et laisse une marque en nous. C’est une claque, un coup de cœur, une réussite que tout le monde devrait lire, de 15 à 99 ans. Un énorme merci aux éditions Akata, pour leur confiance, pour me confier leurs livres, et pour publier des histoires pareilles.

 

EN BREF : Ce roman est complètement bouleversant. C’est un torrent d’émotions diverses qui m’a emportée avec lui au fil de ma lecture. Les sujets abordés sont sensibles, difficiles, mais il est nécessaire de les aborder. Les personnages sont cohérents et nous font vivre une expérience unique. Ce livre nous sonde et nous questionne. C’est un appel à la bienveillance et l’acception de soi et des autres. Un coup de cœur à découvrir absolument.

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