La panthère des neiges de Sylvain Tesson

‎23-07-2021 16:16

La panthère des neiges de Sylvain Tesson

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Découvrez le coup de coeur CulturaLivres de la semaine : La panthère des neiges de Sylvain Tesson en format broché et La panthère des neiges en format poche, également disponible en version e-book et en version audio sur Cultura.com

 

Gros coup de coeur !!

 

Sylvain Tesson est un homme qui a la bougeotte. Il ne peut rester en place. Les récits de ses voyages, de ses marches, de ses traversées en témoignent.

 

Rester à l’affût pendant des jours par des températures de -30° sur les plateaux du Haut Tibet aurait dû lui être particulièrement difficile. Mais il avait un but : voir la panthère des neiges qu’il associait à sa mère défunte et à l’amour perdu d’une jeune femme. Comme à son habitude, les pages de son récit sont ponctuées de réflexions personnelles, de descriptions de la Nature empruntes de poésie ainsi que de réflexions philosophiques.

 

Le comportement de l’homme : « La majeure partie de la Terre n’était pas ouverte à notre race. Faiblement adaptés, spécialisés en rien, nous avions notre cortex pour arme fatale. Elle nous autorisait tout. Nous pouvions faire plier le monde à notre intelligence et vivre dans le milieu naturel de notre choix. Notre raison palliait notre débilité. Notre malheur résidait dans la difficulté de choisir où demeurer. »

 » La dégradation du monde s’accompagnait d’une espérance frénétique en un avenir meilleur. Plus le réel se dégradait, plus retentissaient les imprécations messianiques. Il y avait un lien proportionnel entre la dévastation du vivant et le double mouvement d’oubli du passé et de supplique de l’avenir. »

 

Le comportement des animaux peuplant ces contrées :  » (…) un loup surgit. Il trottait le long du talus, cou projeté. Il tourna la tête sans ralentir l’allure, pour s’assurer que nous ne faisions pas de mouvement vers lui. (…) Au même instant, déboula une centaine d’ânes sauvages, à la course. Ce fut un ballet lent sur une scène géante. Les mouvements de chacun suivaient l’axe d’une chorégraphie : le loup trottait, les ânes couraient, ils passèrent à une cinquantaine de mètres d’un groupe d’antilopes chirous et d’un troupeau de gazelles procapra immobilisé dans les oyats. Chaque troupeau de frôlait, aucun ne se mêlait aux autres et les ânes filèrent sans déranger personne. Chez les bêtes, on voisine, on se supporte, mais on ne copine pas. Ne pas tout mélanger : bonne solution pour la vie en groupe. »

Et enfin la patience :  » J’avais appris que la patience était une vertu suprême, la plus élégante et la plus oubliée. Elle aidait à aimer le monde avant de prétendre le transformer. Elle invitait à s’asseoir devant la scène, à jouir du spectacle, fût-il un frémissement de feuille. La patience était la révérence de l’homme à ce qui était donné. »

 

Lire « La panthère des neiges » après la période de confinement nous interpelle encore plus profondément. Sylvain Tesson fait référence souvent aux enseignements du Tao. Celui-ci m’a particulièrement interpellée : « Devant l’agitation fourmillante des êtres ne contemple que leur retour. Les êtres divers du monde feront retour à leur racine. Faire retour à la racine, c’est s’installer dans la quiétude. »

 

Lire Sylvain Tesson, comme toujours, fait du bien à l’âme.

 

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2 Réponses 2
‎18-05-2020 17:03

Re: "La panthère des neiges" de Sylvain Tesson

Bonjour @MAPATOU 

Merci beaucoup pour ce partage. J'ai découvert Sylvain Tesson lors de son passage dans l'émission "Passage des arts", sur France5. Une personne étonnante et riche en expériences. Cette "Panthère des neiges" me tente énormément. Au vue des extraits que vous donnez, son écriture semble se rapprocher de celle de Jean-Christophe Rufin, que j'adore.

‎02-06-2020 09:57

"La panthère des neiges" de Sylvain Tesson: la philosophie de l'affût

Quand un photographe animalier invite un écrivain voyageur dans sa quête d'une créature animale mythique voire mystique, cela donne pour sublime résultat ce récit poético-philosophique qui érige la contemplation comme principe de vie. Un fantastique hymne à la nature!

 

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Sylvain Tesson est un magicien des mots.  Chaque phrase de ce roman est travaillée, ciselée pour provoquer la réflexion, l'admiration, l'apaisement ou le sourire... en bref, l'émotion. Aucun mot n'est laissé au hasard, des aphorismes au vocabulaire emprunté à la foi religieuse. Tantôt prière, tantôt sermon: une prière pour la nature qui s'éteint, un sermon contre l'Homme qui la piétine. 

Accompagnant Vincent Munier sur les hauts plateaux du Tibet, dans un milieu hostile fait de pierres et de froid, Sylvain Tesson, l'impatient, se prend au jeu de la quête de cette panthère fabuleuse. Une traque indolore et photographique qui nécessite l'apprentissage de l’affût: beaucoup de patience, de discrétion et d'humilité. Voir s'apprend et se travaille. Se savoir observé par les maîtres des lieux est une leçon. Une leçon notamment cristallisée par la photo faite par Munier d'un faucon crécerelle qui dévoilera seulement au moment de son développement, la panthère en arrière plan, fondue dans la pierre. Prédateur invisible au photographe au moment de la prise. Remettant l'Homme super-prédateur au rang de proie.
 
Au-delà du roman d'aventure, La panthère des neiges est surtout une transcription par les mots de Tesson du témoignage que le Munier silencieux réalise en images. Une réflexion écologique de l'impact de l'Homme sur son environnement. Un Homme que Sylvain Tesson décrit comme un bien piètre conservateur de ce musée-Terre. Un Être supposé intelligent qui ne voit pas plus loin que le bout de son intérêt et qui a réussi, en quelques milliers d'années d'existence épileptique, à venir à bout de milliers d'espèces animales qui peuplent la Terre depuis des centaines de milliers d'années avant lui. La panthère des neiges n'étant qu'une espèce en voie de disparition parmi d'autres mais certainement une des plus belles représentantes, une reine dans son royaume. 
La préservation de la nature par la contemplation, c'est à cela que nous invitent Munier et Tesson. Ne rien toucher avec nos grosses pattes d'Homme. Regarder et s'émerveiller. Se contenter de ce que l'on voit. Une vision de l'écologie qui me parle, bien plus accessible et pacifiste que les discours du moment.
 
La panthère des neiges n'est qu'une moitié du diptyque qu'a engendré ce voyage. Car Sylvain Tesson a légendé, dans un second ouvrage, les photographies prises par Vincent Munier lors de cette quête. Elles sont regroupées dans l'album Tibet: Minéral animal (aux Editions Kobalann)  dont plusieurs photos sont visibles sur la toile et permettent de donner relief et textures aux descriptions du roman (et Bon Dieu! Quelles photos!). 
 
Et si vous succombez à l'appel de la panthère, je vous propose également d'écouter l'enregistrement de l'interview de Munier et Tesson sur France Inter. Sylvain Tesson parle comme il écrit, avec un incroyable sens de la mélodie des mots, de la formule poétique. A ses côtés, Vincent Munier touche par son humilité.
 
Ça se sent que c'est un coup de cœur ou pas???
Et une (fameuse) Baignoire d'Or! Une!
 
(tous mes autres coups de coeur/coups de **bleep** sont à retrouver sur le blog d'Un Livre Dans Ma Baignoire ici )
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A retrouver sur Cultura.com !
Laure / Un Livre dans ma Baignoire
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