J'ai trouvé très étrange qu'en tapant ce titre, aucun post de la communauté ne soit apparu afin qui je puisse mettre le mien à sa suite... Il serait incroyable qu'il n'y ait aucune chronique sur cet excellent roman.
Avec ce roman entièrement dédié à Menie Grégoire, c’est toute la société des années 1960 aux années 1980 qui est passée au crible et notamment la « place » faite aux femmes dans cette société d’un pays qui se dit moderne.
La plupart des femmes de 60 ans et plus, si elles n’ont pas écouté les émissions révolutionnaires pour l’époque de Menie Grégoire, ne peuvent pas ne pas en avoir entendu parler. Elle a ouvert le dialogue sur beaucoup de thèmes sociétaux importants dont personne ne parlait publiquement à l’époque tels la sexualité, la contraception, l’avortement, les problèmes de couple, la famille, l’éducation des enfants, l’inceste dans les familles. Il n’y avait aucun sujet tabou, elle était leur mère, leur sœur, leur confidente. Elle a amené des générations de femmes à se libérer du joug imposé par leur sexe. Elle est devenue la voix de toutes ces femmes qui ne pouvaient s’exprimer. Elle a déconstruit le schéma dans lequel étaient élevées les petites filles, à savoir, accomplir son travail d’épouse, soutenir son mari, s’occuper des enfants et tenir son foyer. Elle leur a ouvert des horizons en parlant du plaisir féminin , de la contraception, de la possibilité de travailler et de la répartition de tâches. Bien entendu, elle s’attira l’ire des hommes et même de beaucoup de femmes.
Dans cette fiction basée sur des faits réels et avérés par l’immense documentation laissée par Menie Grégoire, nous suivons son destin bien réel agrémenté probablement d’une petite dose de fictionnel, mais aussi celui de la narratrice Esther Khan ainsi que ceux de deux générations de femmes d’une même famille, Mireille, Suzanne et Catherine totalement inventées cette fois-ci, afin d’imaginer l’impact des émissions de Menie sur celles qui les écoutaient.
De Marie Laurentin, Menie Grégoire, nous apprenons son enfance dans cette famille bourgeoise catholique pratiquante sous le joug d’une mère très stricte qui voulait faire de sa fille une future épouse parfaite, effacée et efficace à son image. Elle épousera Roger Grégoire qui deviendra Conseiller d’Etat et ils auront trois filles. Menie écrit quelques articles dans une revue féminine sur l’évolution de la société, elle commence à recevoir de nombreuses lettres de femmes qui lui exposent leurs problèmes. C’est en 1967 , à la cinquantaine, qu’elle est approchée par Philippe, responsable des programmes sur RTL. Il lui propose de partager une petite émission avec d’autres journalistes. Elle va alors y lire le courrier d’une femme et y répondre en direct. Suite à cela , elle aura sa propre émission et le succès que nous lui avons connu avant que tout ne s’arrête en 1980 avec l’évolution de la société et les besoins d’audience des médias.
Ce livre qui nous replonge dans les années soixante, soixante-dix, époque pas si lointaine où la femme était assujettie à son mari qui prenait toutes les décisions pour elle et la cloitrait dans son foyer, à son service et à celui de ses enfants. Ce sont des femmes comme Gisèle Halimi, Simone Veil et Menie Grégoire, entre autres, bien sûr, qui ont fait bouger les choses si bien qu’aujourd’hui nous bénéficions du fruit de leurs combats sans nous rendre compte comment il a été difficile de s’imposer face au patriarcat dominant.
Même s’il reste encore du chemin à faire, il est bon de se rendre compte de celui déjà parcouru.
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